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21 octobre 2004

Texte de Pierre Pujo

"Turquie : Chirac trompe les Français

Dimanche 26 septembre Nicolas Sarkozy réclamait un référendum sur l'entrée de la Turquie dans l'Union européenne. Jacques Chirac se devait de réagir. Dès le jeudi suivant, il reprenait donc l'idée à son compte dans une conférence de presse en précisant que la consultation aurait lieu dans un délai de 10 à 15 ans. C'était là se moquer du monde ! S'il est possible de fermer la porte de l'Europe à la Turquie, c'est dès maintenant qu'il faut consulter les Français.

Le 17 décembre prochain, en effet, un sommet des chefs d'État et de gouvernement doit décider de l'ouverture de négociations avec la Turquie ; la Commission de Bruxelles vient d'émettre ces jours-ci un avis favorable. Depuis qu'en décembre 2002 le sommet de Copenhague a adopté le principe de l'adhésion de la Turquie à l'Union (sous la pression des Américains) un engrenage s'est mis en marche et conduit inexorablement à l'adhésion de la Turquie. Sauf si un coup d'arrêt était donné maintenant. L'opinion publique est très largement hostile au projet. M. Chirac – il l'a encore souligné jeudi – y est pour sa part favorable. Avec lui le processus continuera à se développer. D'ores et déjà, il est quasiment irréversible.

La Turquie et nous

Il restera à voter "non" au référendum sur la constitution européenne. Si celle-ci est rejetée, le projet d'adhésion de la Turquie sera remis en cause. Il y aura donc deux référendums en un à l'automne 2005. M. Chirac tente de découpler la question turque de la constitution européenne. Il a toutes chances d'échouer. Les Français, si peu consultés sur la "construction européenne" depuis trente ans (un seul référendum – sur le traité de Maëstricht – en 1992), saisiront l'occasion pour donner globalement leur avis sur les deux sujets. Ce devrait être un non.... "franc et massif" !

On peut parfaitement concevoir des relations politiques, économiques, culturelles privilégiées entre la Turquie et les pays européens, mais non que celle-ci entre dans une Europe intégrée comme celle qui est aujourd'hui projetée. On amuse le tapis en faisant dépendre l'entrée de la Turquie de son plus ou moins grand respect de la "démocratie" et des "Droits de l'Homme". La géographie, l'histoire, les mœurs, empêchent la Turquie d'entrer dans l'Europe. On aurait mieux fait de le lui signifier dès le début au lieu d'entretenir ses dirigeants dans de faux espoirs. L'arrivée d'une Turquie de 80 millions d'habitants déséquilibrerait complètement l'Union européenne.

M. Chirac tient à ce projet car il ne veut pas indisposer l'Allemagne, favorable aux Turcs. Mais si l'on admet la Turquie, pourquoi ne pas accepter aussi l'Algérie, le Maroc et la Tunisie qui, sur tous les plans, sont beaucoup plus proches de la France que la Turquie ? Une fois de plus on constate que l'Union européenne nous éloigne des pays avec lesquels nous avons le plus d'affinités pour nous imposer des relations – sinon une domination – extérieures à notre vocation nationale.

Le refus de l'Empire

Quand bien même la question turque ne se poserait-elle plus, quand bien même une arrivée massive de musulmans dans l'Union européenne serait-elle écartée, quand bien même la référence chrétienne serait-elle inscrite en tête de la constitution européenne, la constitution élaborée par la Convention européenne devrait être rejetée. Elle établirait un nouvel Empire romain-germanique analogue à celui à l'encontre duquel les rois de France ont affirmé leur indépendance. Elle abolirait mille ans d'histoire. Elle mettrait fin à l'exception française. Or cette exception, nous y tenons, non seulement par fidélité à nos ancêtres, mais aussi parce que le maintien de nos traditions, de nos libertés, en dépend. Beaucoup de Français, trompés par une propagande fallacieuse disposant d'énormes moyens de pression, n'en sont pas conscients. Quand ils s'apercevront de tout ce que nos politiciens, de droite et de gauche, ont lâché en consentant à des abandons de souveraineté depuis un quart de siècle, ils seront effrayés, mais il risque alors d'être trop tard pour revenir en arrière car ces abandons sont proclamés irréversibles.

Fort heureusement, le camp du "non" se renforce au point que dans celui du "oui" – qui réunit U.M.P., U.D.F. et une partie des socialistes –, on commence à s'affoler. Les grands médias audiovisuels s'engagent aussi pour le "oui", certains avec une partialité écœurante, ainsi France-Inter. On nous prédit les pires catastrophes si le "non" l'emportait. C'était déjà le cas il y a cinquante ans lorsque le projet d'armée européenne faisait l'objet de débats passionnés. Le 30 août 1954, le projet fut rejeté par l'Assemblée nationale. Il n'y eut pas de catastrophe. De nouvelles négociations s'engagèrent, et les gouvernements trouvèrent une autre formule, respectant la souveraineté de la France sur son armée, pour assurer la défense de l'Europe...

À vrai dire, une victoire du "non" ne serait pas une catastrophe pour la France, ni pour l'Europe – car il serait alors possible de mettre en place une Europe des États plus réaliste. La catastrophe serait pour les partis de l'Établissement et leurs chefs Chirac, Raffarin, Sarkozy, Bayrou, Hollande, Strauss-Kahn, qui seraient désavoués par le peuple français. Bonne occasion de renouveler la politique dans notre pays !

Les socialistes et la nation

On nous dira : le camp des "non" est hétéroclite. Le camp des "oui" l'est aussi puisqu'il réunit des chiraquiens et des socialistes en principe adversaires. Le projet de constitution européenne provoque un nouveau clivage politique, et c'est tant mieux. On discerne peu à peu ceux dont le choix va objectivement dans le sens des intérêts de la France et des Français, et ceux qui sont accrochés à leur idéologie mortifère. Certes, à gauche, on rejette la constitution européenne au prétexte qu'elle ne va pas assez loin dans l'intégration des États. Selon certains, une plus grande intégration ferait échec à un libéralisme remettant en cause nos acquis sociaux. Il reste à ces gens de gauche à comprendre que la meilleure garantie de la sauvegarde de ces acquis sociaux, c'est la nation et que la France risque fort d'être battue dans des votes à la majorité qualifiée sur ce terrain-là. Le super-État que l'on nous annonce renforcera la jungle mondialiste et nous laissera sans défense.

Au fond, les socialistes buttent sur la notion de frontières. Il est vrai qu'ils ont une vieille tradition internationaliste. Mais quand ils se heurtent aux réalités nationales, il arrive que certains d'entre eux ouvrent les yeux... S'opposant aux libéraux, ils doivent un jour ou l'autre retrouver la nation. Il n'est pas de pires ennemis de la nation que les libéraux, qu'ils soient démocrates-chrétiens ou non.

Pour notre part, à l'Action française, nous ne cherchons pas à expliciter un "non de droite" comme il y aurait "un non de gauche" défini par le Parti communiste ou par Laurent Fabius. Nous entendons être porteurs d'un "non français" qui rejette la constitution européenne car elle conduit à la mort de la France et à son absorption par un nouvel Empire. Au-delà du référendum annoncé nous entendons travailler au réveil du sentiment national, hélas bien affaibli aujourd'hui, mais qui peut avoir des sursauts inattendus."

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